fleur_maladive Muggle
Age: 35 Inscrit le: 17 Juil 2005 Membre No.: 624 Messages: 5 Posts per day: [0] Localisation: Rabat
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Posté le: 31 Aoû 2005 10:42 Sujet du message: Maroc - Escapade dans les cascades |
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Me voici revenue d'un périple de deux jours intenses en effort et en émotion, à faire pour tous les amoureux de la nature qui veulent voir à quoi pourrait ressembler le paradis.
C'est un coin perdu du Maroc, dans la région de Chefchaouen, ou de Chaouen, ville mondialement connue des adorateurs de cannabis (de grandes plantations dans le coin) mais là n'est pas le but du voyage. Le coin s'appelle Akchour, dans le rif, du nom de la rivière qui coule dans la vallée montagneuse. Une petite bourgade de deux ou trois bâtisses : un pseudo restaurant bien rustique, on mange comme à la maison des ptis plats bien de chez nous pour genre 1euro 50 par personne, une épicerie et une maison d'hôte, pour ceux qui veulent passer la nuit. Vue sur les montagnes, le lac en dessous, le ciel au-dessus, d'un bleu éternel, pas de nuages. Au loin une buse ou un faucon sont entrain de chasser. Par ci par là des vendeurs de shit et des oisifs.
Plus loin un parking, on laisse la voiture et on marche, on découvre un peu la vallée, on va se baigner, et on revient. Mais nous ne l'entendons pas de cette oreille. Vite fait, nous prenons nos sacs de couchage, l'essentiel pour la survie, nourriture et torches, et nous nous engouffrons dans la vallée, à la recherche d'aventure. Mon frère ne se rappelle plus du chemin, nous demandons notre route à un jeune baigneur du coin. Qu'a cela ne tienne, il décide de nous accompagner jusqu'au coin pour passer la nuit. Et nous marchons, nous marchons. Le soleil tamponne nos visages de sueur, mais la magie fait que l'on passe d'une ambiance à l'autre en moins d'une minute de marche. Le sentier est tantôt à découvert, jaune et sableux, tantôt encastré dans un sous-bois à l'ombre clémente, aux couleurs verte, orange et marron. Souvent il nous faut essayer de grimper, les descentes sont glissantes, mes genoux s'en souviennent ! Ou alors traverser la rivière et nos pieds sont délicieusement rafraichie par l'eau claire et glacée.
Enfin, nous arrivons à ce qu'ils appellent "la petite cascade". Un bassin d'eau de paradis, un jacuzzi naturel, la nature comme on ne la voit qu'en photo, en se disant "il a de la chance le photographe d'être dans un coin pareil". Et cette fois, je pouvais me dire ça pour moi. La cascade s'écrase dans un étang sombre, une dizaine de mètres au-dessous. Une fois en bas, comment remonter ? Qu'a cela ne tienne, il va sauter. Il se déshabille, se concentre sur le fond, et saute. Un long cri de plaisir, un splash puis un hurlement de joie. Cinq minutes plus tard il remonte par la paroi... Je me contente de me baigner dans le bassin au milieu des arbres en fleur, du laurier rose en majorité.
Mais la route est loin d'être finie. L'on m'annonce qu'il y a une seconde cascade, celle que l'on appelle "la grande cascade". Alourdie par l'eau mais allégée par le plaisir de la découverte, je remets mon sac sur le dos, et en avant. La route est encore plus longue, encore plus difficile, mais qu'importe. Je ne pourrais pas énumérer toutes les curiosités que l'on a pu y voir, toutes les anecdotes et tous les cassages de gueule. Dans la joie et dans la bonne humeur. Et puis enfin, on y arrive. L'apothéose. La cascade se jette du haut de la montagne dans un bruit qui nous impose un silence religieux. On ne parle pas, on regarde. C'est grand, on s'écrase. L'eau est glacée. On se glace quand même. Les mots me manquent ici.
Pour passer la nuit, on rebrousse chemin, en direction d'une clairière que l'on a rencontré un peu plus tôt. Trop grande, elle ne nous plait pas, on va juste en dessous, dans une plus petite clairière broussailleuse. Nous enlevons les pierres et les herbes folles, et chacun va à la recherche de boins et de brindilles pour faire un feu. Pour éclairer la nuit. Pour réchauffer la nuit. Et pour faire un thé. Les roches réunies en cercle, le feu en plein milieu. Il a quelque chose de fascinant avec la tombée de la nuit. On lève la tête, les premières étoiles. Le feu est réconfortant et nous parlons, comme si le silence nous rappelait trop que nous étions au milieu de nul part. Un petit sentiment d'anxiété, de la peur mêlée à de l'excitation. On joue à semer le trouble, on parle de scorpions et de serpents. On imagine des yeux de loups dans les buissons (tout le monde sait qu'il n'y a ni loup ni renard dans les environs). Et puis là, juste devant moi, sur une pierre qui entoure le feu, un scorpion. Tout petit, tout jaune. Il se réchauffe. Les jurons fusent, tout le monde panique, tout le monde rigole après. Pas très rassurée, on dispose tout de même le campement. La nuit est complète maintenant, l'on distingue même la voie lactée qui traverse les constellations. On s'amuse à reconnaitre des étoiles, à raconter leur histoire...
Au moment de dormis, à la lueur d'une bougie, en revoilà un autre encore, qui marche tranquillement vers les buissons, même pas inquiété par les cinq humains autour de lui. Cette fois-ci, c'est décidé, on ne peut pas dormir là. Impossible de fermer l'oeil. Un scorpion à cinq centimètre du visage de l'un de nous, non, impossible. La décision ne se fait pas attendre, on retourne à la grande clairière, dans la nuit.
Ce sentiment de marcher dans la nuit sauvage à la leur d'une torche et de quelque bougies est impressionnant. C'est terriblement exaltant, d'autant plus que les bougies n'éclairent rien. A un moment, nous devons grimper. On se serre les coudes, on se jette les sacs, on s'aggripe l'un à l'autre. On rigole, on se fait peur. Et on arrive à la grande clairière. Inspection au millimètre près, à la recherche de petites bêtes qui piquent. Mais les buissons sont loin de nous, nous pouvons dormir tranquilles. Maintenant pourtant, plus personne n'a sommeil. Un autre pétard pour retrouver un peu de torpeur, on joue aux cartes. Il fait trop noir pour chercher encore du bois, on ne fait pas de feu. Tout le monde s'engouffre dans son sac de couchage, on dort. Dormir ?
S'il y a quelque chose à ne jamais sous-estimer, c'est le froid en montagne.
Enfin, le matin arrive, toujours froid, mais lumineux. Il est cinq heures environ, la compagnie émerge. Certains on eu la chance de dormir. Je suis complètement à côté, les yeux derrière, les cheveux dessus. C'est ça des vrais vacances pour moi. Ce côté sauvage, naturel, primaire même. La randonnée se poursuit, l'on rentre. Une dernière baignade.
_________________ B - VO/ MORT |
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